Se chauffer au bois émettrait moins de CO2 qu’en utilisant l’électricité nucléaire. Etonnant non ?

Je viens de découvrir un tableau qui compare les différentes sources d’énergie selon leur émission de CO2 par kWh émis. Se chauffer au bois, dans un monde où les gaz à effet de serre, et en particulier le CO2, occupent le paysage politique et médiatique, peut paraître suspect. C’est l’occasion de se faire une petite idée des émissions par énergie.

Question qui semble plutôt simple.

Il suffit de mesurer la quantité d’énergie émise lors de la combustion, et de mesurer le volume de CO2 émis. Une petite règle de trois. Et emballé, c’est pesé.

Hum.

Bon, si on y réfléchit deux minutes, on réalise aisément que, ce qui brûle dans sa chaudière, n’est pas arrivé par téléportation et n’apparaît sûrement pas spontanément sous la forme utilisée. Bref, à la règle de trois, il y a quelques ajustements à faire.

Je vous laisse consulter le tableau ci-dessous. Il compare la quantité de CO2 émise par source d’énergie. Ce tableau date un peu. A vrai dire, je n’ai pas une confiance à toute épreuve sur l’exactitude de ces chiffres. 

MAIS, il donne un ordre de grandeur des énergies les plus émettrices de CO2.

Quelques éléments contre-intuitifs y apparaissent…

Quantité de CO2 par kWh/combustible

CombustibleCO2 par kWh
Se chauffer au bois (sapin) – stère0.008kg
Bois déchiqueté, copeaux, plaquettes0.01kg
Bois de chauffage (chêne) – stère0.01kg
Bois de chauffage (hêtre) – stère0.01kg
Courant vert (hydraulique)0.022kg
Granulés de bois (pellets)0.04kg
Granulés de bois (pellets)0.04kg
Courant vert (éolienne)0.04kg
Electricité nucléaire (France)0.09kg
Biogaz – 40% Méthane0.14kg
Biogaz – 75% Méthane0.14kg
Eléctricité (mélange suisse)0.16kg
Courant vert (photovoltaïque)0.1kg
Gaz naturel0.24kg
Gaz propane0.24kg
Mazout de chauffage0.3kg
Mazout de chauffage0.3kg
Electricité (Europe UCPTE)*1.3kg

Source : domo Energie. Selon les auteurs de ce tableau, l’énergie grise, c’est-à-dire l’énergie nécessaire à l’extraction, transformation, transport de chaque source d’énergie,  est prise en compte dans la mesure du CO2 émis.

*UCPTE (maintenant ENTSO-E) interconnexion des réseaux électriques européens en 2010. Aujourd’hui, le mix est différent, les énergies d’origine fossile représente moins de 50% de la production électrique, même avec l’Allemagne qui a arrêté le nucléaire.

Le bois, le bois, le bois !

Selon ce tableau, le bois est l’énergie la moins émettrice de CO2. Et de loin.
Il ne nous reste plus qu’à appeler le ramoneur.

Pourquoi le bois ne serait-il pas plus utilisé s’il est si peu émetteur de CO2 ?

Le bois est considéré dans ces calculs comme énergie renouvelable, c’est à dire à biomasse constante. Ou autrement dit, on considère ici que les forêts produisent autant de bois que ce que l’on prélève, ici pour le chauffage.

Le CO2 émis à la combustion pour se chauffer n’est donc pas comptabilisé (ou si peu) parce qu’il est compensé par le CO2 absorbé par la forêt.

Dans l’absolu, c’est loin d’être le cas. Entre la déforestation pour l’agriculture, les feux de forêts, qui atteignent, par leur fréquence et leur ampleur, des niveaux jamais atteints de mémoire d’homme, on est loin du compte. Localement, cela peut-être vrai, globalement, c’est une autre histoire…

Voici maintenant un tableau qui compare combustible et émission de CO2, sans autre considération. L’unité est le joule. Ce n’est pas grave, ce sont les ordres de grandeur que l’on considère.

Le bois émet plus de CO2 que le charbon et le fioul et deux fois plus que le gaz naturel. 

CombustibleFacteur d’émission (gCO2/MJ ou tCO2/tep)
Bois (anhydre) 101,9
Charbon 96,3
Fioul 73,2
Gaz naturel ……….56,4

(Concawe/Eucar/JRC, 2007 ; IPCC, 2006)

Le gaz, le gaz, le gaz !

A lire ce tableau, si l’on considère l’émission de CO2 à la combustion, le gaz naturel est le plus pertinent.

Alors ?

Ce petit exemple illustre combien il est difficile de conclure par les chiffres et combien le débat actuel est compliqué, voire illisible. On finit par faire dire tout et son contraire. 


Je trouve que bien trop souvent, on commence par prendre position, puis on trouve les arguments. 

Alors le Bois.

L’utilisation du bois a, bien sûr, beaucoup de vertus. Je dis “biens sûr”, parce que j’adore le bois, et que je vais trouver pleins d’arguments pour le défendre. (Je plaisante).

Tout dépend de son origine. Si il est au fond du jardin, que vous captez quelques stères par an, quelques arbres, parmi une cinquantaine… Vous ne représenterez tellement pas la majorité que cela n’a aucune incidence.

Premier élément à prendre en compte : pour se chauffer au bois, il faut considérer son origine.

Provient-il de forêt durable ? De déchets de scieries ?
Localement, l’utilisation de bois de chauffage a du sens, surtout si vous utilisez une chaudière à haut rendement énergétique. Une cheminée ouverte, n’aura pas la même performance qu’un poêle à effet de masse. Enfin une petite flambée de temps en temps, ça fait du bien au moral.

Deuxième élément : quelle alternative à son usage (vs la construction d’une maison) ?

Le bois capture le CO2 de l’atmosphère, mais à sa décomposition, il en réémet. L’usage du bois pour des meubles ou des bâtiments a cet effet bénéfique de sortir le carbone du cycle du CO2. Donc, si c’est un bois de bonne qualité, dommage de le brûler.

Troisième élément : quelles alternatives énergétiques ai-je à disposition ?

On peut ajouter à cette question, les alternatives qui correspondent à mon budget, aux aides disponibles.

Se chauffer au bois peut être perçu comme contraignant (aller chercher une bûche pour la mettre dans la cheminée, nettoyer la cheminée, le fourneau), aussi est-il souvent utilisé comme source complémentaire de chauffage. 

Idéalement… et ce sera ma conclusion

Le bois est un matériau fantastique. 

Faisons cette petite expérience de pensée :
1. Mettons côte à côte une forêt et un champ pétrolifère. Ok, c’est fait. 

2. Continuons l’expérience : imaginons que notre maison est une maison toute en bois (ossature, bardage, cloisons, revêtement intérieur), à énergie passive (RT 2012 oblige), ou même à énergie positive (RT 2020), toute en bois. 

Cette maison, c’est du CO2 capturé… en barre ! 

3. Elle serait chauffée, pour ce qu’il resterait à chauffer, par une petite stère par an (c’est possible !) prélevée dans son jardin, chez le voisin, ou dans une forêt proche.

Donc le bois, le bois, le bois, des maisons en bois, peu énergivores, chauffée avec un tout petit peu de bois, le cas échéant. Car la maison capte déjà l’énergie solaire pour fournir l’eau chaude sanitaire, se chauffer (énergie passive), s’éclairer (photovoltaïque)…

Oui, ok, mais, si on prend en considération l’énergie et les ressources pour fabriquer les panneaux solaires, alors c’est sûr que… ?

PS :  et le nucléaire ?

J’ai recherché également les émission de CO2 de l’électricité d’origine nucléaire en France (voir le premier tableau, le chiffre du nucléaire français est issu d’une autre source). Si l’on considère la seule matière première (l’uranium), l’émission est nulle. Elle ne l’est plus du tout si l’on prend en compte toute la chaîne de production du combustible et de la centrale (extraction de l’uranium, transport, transformation, gestion des déchets, construction, et… des pertes en ligne). Là où ça se complique encore, c’est qu’une centrale émet énormément de gaz à effet de serre : la vapeur d’eau. Heureusement, la vapeur d’eau ne reste que quelques jours dans l’atmosphère. L’impact est alors négligeable sur les Gaz à Effet de Serre (GES). Ouf.
Reste les autres éléments à prendre à compte qui portent à débat (risque, gestion des déchets, coût réel…).

Malgré cela, on voit que même l’énergie nucléaire est loin d’être une énergie qui n’émet pas pas de GES (même EDF le dit (4g/CO2/kWh)), contrairement à l’idée répandue. Certes, elle en émet moins que le charbon, mais plus que l’éolien, l’hydraulique (pas selon EDF), et le…. bois. 😉 

Pour aller plus loin, voici une extrait d’un rapport de l’Ademe (Base Carbone V11) qui cite une étude de 2008, il y est souligné que les mesures estimées sont proches de celles de l’Ademe, sauf le nucléaire. Dans ce même rapport de l’Ademe, le nucléaire produirait 10g/CO2/kWh.

Estimation de l'émission de CO2 par source d'énergie - se chauffer au bois émet moins de CO2 que les énergies fossiles et le nucléaire
Estimation de l’émission de CO2 par source d’énergie pour générer de l’électricité

C’est article vous a plus, interpelé, n’hésitez pas à le partager !
Merci également pour vos commentaires, ce n’est que le cinquième article du blog… Ils m’aideront, c’est sûr !

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2 réflexions au sujet de “Se chauffer au bois émettrait moins de CO2 qu’en utilisant l’électricité nucléaire. Etonnant non ?”

  1. Hello,
    Il y a quelques jours, je lisais justement un article sur les poêles à bois et il semble que beaucoup de personnes optent pour cet appareil. Merci pour toutes ces infos sur ce mode de chauffage.

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  2. Bonjour,
    Le bois ne peut pas être neutre en CO2 sinon, il faudrait dans le même temps que brule un arbre, un autre repousse à la même vitesse, impossible, de plus il n’y a pas que le bois qui émet du CO2 plein d’autres combustibles, donc les arbres absorbent tous les CO2, donc l’Ademe ment totalement, sur ce point elle a tout faux. De plus il émet des particules fines dangereuses pour la santé, voir la vallée bien connue de l’Arve où les gens sont empoisonnés par les particules du bois de chauffage.
    Voila le CO2 produit par les principaux combustibles y compris leur extraction et transport (ne pas l’oublier) :
    Bois =431gr/kWh
    Charbon= 389gr/kWh
    gaz naturel = 263gr/kWh
    Le bois émet plus de CO2 que le charbon.

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